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Comment l’Afrique peut-elle tirer profit de sa jeunesse ?

L’Afrique est souvent considérée comme le continent d’avenir, selon de nombreux rapports, articles et dossiers de presse publiés quotidiennement. Avec plus de 200 millions de jeunes âgés de 15 à 24 ans, elle détient la plus grande population de jeunes au monde, un chiffre qui pourrait même doubler d’ici 2045. Pourtant, rien actuellement ne semble indiquer que cette tranche de la population soit considérée comme une priorité par les politiques publiques.

D’après une étude d’Afrobaromètre réalisée en 2023, les jeunes Africains considèrent le chômage comme le problème le plus pressant, devant les questions économiques et de santé. Le rapport révèle que quatre jeunes sur dix sont au chômage et cherchent activement un emploi. Bien que beaucoup soient diplômés, ils se trouvent souvent marginalisés. En outre, dans 39 pays étudiés par l’équipe d’Afrobaromètre, seulement deux jeunes sur dix jugent leur gouvernement efficace dans la création d’emplois. Plus inquiétant encore, environ deux tiers des jeunes estiment que leur pays suit une « mauvaise direction » en matière de gouvernance et de développement économique.

Dans un tel contexte, le pessimisme grandit et les chances de survie s’effritent, obligeant plusieurs, malgré les risques, à tenter  l’aventure de la mer à la recherche de meilleures conditions de vie.

Pourtant, si l’Afrique parvient à canaliser l’énergie et les compétences de sa jeunesse, le continent peut se préparer à une véritable transformation. Pour cela, il est essentiel d’offrir aux jeunes les moyens et opportunités de participer activement aux décisions publiques, à travers une démarche triptyque : FORMER, IMPLIQUER et PRÉPARER.

FORMER 

Le défi actuel de l’Afrique n’est pas tant de former davantage, mais de former de manière plus pertinente. Bien que le continent compte un grand nombre de diplômés, il continue de stagner dans la pauvreté. Il existe un écart considérable entre la formation académique et les réalités du monde professionnel. Il est donc essentiel de repenser les programmes éducatifs pour les adapter aux besoins d’un marché du travail en constante évolution. Transformer les systèmes éducatifs africains est essentiel pour doter les générations actuelles et futures des compétences du 21e siècle. 

Pour y parvenir, il est nécessaire de privilégier les formations techniques et professionnelles, qui non seulement préparent à l’emploi, mais permettent également aux jeunes de contribuer activement à leur communauté et de devenir des moteurs de progrès. Cela implique de mettre en place des mesures audacieuses pour tester de nouvelles approches d’apprentissage, favoriser les programmes de mentorat et miser sur le numérique qui offre des opportunités exceptionnelles pour acquérir le savoir d’autant plus qu’avec l’avènement de l’intelligence artificielle, les métiers traditionnels sont au bord de la disparition. 

De même, il faudra mettre en place des politiques d’éducation qui favorisent l’inclusion. Selon l’UNESCO, le continent a le taux d’exclusion le plus élevé au monde. Des facteurs à la fois économiques et ceux liés au genre expliquent cette situation. Sans une éducation inclusive, l’Afrique peinera à décollage

IMPLIQUER  

Les jeunes du continent sont souvent perçus comme en marge des processus sociaux, économiques et politiques. Nombre d’entre eux ressentent que leur voix compte peu, ou qu’ils ne sont pas suffisamment qualifiés pour assumer certaines responsabilités. Ils subissent l’influence d’une élite plus âgée, dont ils remettent en question le leadership en raison de son incapacité à aborder efficacement les problématiques qui les concernent directement. Cette exclusion pèse lourdement, et plus ils se désintéressent des affaires publiques, plus les décisions qui affectent leur avenir se prennent sans leur participation. Cette situation contribue, dans certains pays, à un désengagement notable de la jeunesse vis-à-vis de la politique. 

De même, les générations ont du mal à se rapprocher. D’un côté, les plus vieux refusent de se retirer de la scène, tandis que les plus jeunes aspirent à créer un monde nouveau au point où l’on pourrait croire que la lutte entre les âges a pris la place de la lutte des classes. Il est donc essentiel pour une meilleure implication des jeunes dans toutes les instances décisionnelles, d’identifier les moteurs de changement et les facteurs de rupture qui détermineront les futurs possibles du continent.

PRÉPARER 

Tant que les jeunes n’auront pas pris leur place, c’est la survie du continent qui est menacée. Pour cela, il faut en finir avec le paternalisme et accorder davantage de confiance à la jeunesse. Afin de les aider à s’affirmer, il faut leur proposer des modèles inspirants, des personnes qui leur servent de phares à l’horizon. 

Il est indéniable qu’aujourd’hui, l’Afrique traverse une profonde crise de modèles. Offrir aux jeunes des repères solides, notamment par le biais de mentors ou de figures inspirantes, peut les inciter à s’engager activement et à se préparer aux défis de demain. Une génération bien accompagnée et inspirée est plus à même de relever les défis du continent.

Face aux structures figées, la jeunesse africaine s’oriente de plus en plus vers l’autonomie pour exploiter son potentiel. Heureusement, des initiatives novatrices voient le jour, portées par des associations qui favorisent l’échange entre générations. IMPACT CAREER est un exemple de ces initiatives prometteuses. Il s’agit d’un forum créé et organisé depuis bientôt trois années par une équipe de jeunes bénévoles qui met des mentors expérimentés à disposition des jeunes pour les guider dans le développement de leur carrière, en restaurant le lien entre générations et en favorisant le partage d’expériences et de conseils pratiques. L’édition de cette année se tiendra à Dakar et suscite un intérêt croissant, donnant l’impression que l’événement vient combler un besoin.

En définitive, l’Afrique peut non seulement retenir, mais valoriser sa jeunesse, en lui offrant la place qu’elle mérite dans la construction d’un avenir durable et prospère pour le continent. 

Cyrille Mbangué

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  • Post last modified:novembre 3, 2024
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